La Lettre de Gestion Privée | Janvier 2025
Faut-il se méfier du consensus ?
Si l’année 2024 était annoncée comme celle des « pivots », en référence aux changements attendus d’orientations de politiques monétaires des grandes banques centrales sur fond de recul de l’inflation, 2025 s’avère de l’avis de tous les investisseurs bien plus complexe à anticiper!
L’investiture du Président Donald Trump a marqué l’entrée dans une nouvelle ère économique et boursière pour au moins quatre années. Difficile, à ce stade, de subodorer l’imprévisible d’une administration qui ne ressemble à aucune autre et sûrement pas à celle de 2016, ni à l’économie des États-Unis et du Monde à cette date.
En ce début d’année, les marchés se sont calés sur l’idée que le programme sur lequel Monsieur Trump a été élu serait rapidement mis en application. Il vise principalement une baisse des impôts, un prix de l’énergie en repli, une tendance à la dérégularisation de secteurs entiers et notamment celui de la finance, l’ensemble devant faciliter la prise d’initiatives par les agents économiques et donc in fine la croissance.
Le passage simultané sous pavillon républicain du Sénat, de la Chambre des Représentants et de la Cour Suprême étant un outil précieux et puissant, à minima jusqu’aux midterms de novembre 2027, pour dérouler à priori sans trop de compromis les lignes majeures de MAGA (Make America Great Again) voulues par le nouveau Président.
Bien entendu les points d’interrogations existent comme l’impact inflationniste des tariffs (droits de douane) et de la politique anti-immigration, ou encore du niveau des déficits et de la dette. S’ils ne sont pas ignorés, ils sont à ce jour mis au second plan et minorés.
Les planètes semblent donc alignées pour que Wall Street affiche une troisième année consécutive de hausse et relègue les autres principales places boursières de la planète au rang de variable d’ajustement des allocations d’actifs. Elles le sont d’ailleurs déjà en partie avec un poids jamais observé de 75% d’actions américaines au sein de l’indice mondial MSCI World.
Mais nous savons tous par expérience et vécu qu’un consensus trop clair et trop établi, surtout dès janvier, n’est très probablement pas celui qui s’exprimera sans ajustements voire renversements tout au long de l’année. Il n’est en fait que l’expression de l’inclusion dans le prix des actions de l’ensemble des nouvelles déjà connues et anticipées.
Dans la liste des opportunités et des possibles surprises face au consensus, l’Europe fait figure d’outsider à forte cote à mettre dans une liste de surveillance positive comme le rappellent de nombreux stratégistes et économistes, dont quelques américains.
Baisse des taux attendue et en partie confirmée par la BCE, surprises potentielles d’une économie chinoise progressivement relancée à laquelle l’Allemagne et la France sont sensibles pourraient par exemple donner envie à quelques investisseurs d’envergure planétaire de remonter légèrement leurs pondérations en actions européennes. Des actions qui ont rarement été aussi peu détenues dans leurs portefeuilles alors même que l’écart de valorisation, et donc de décote, est à un extrême en leur faveur.
Bien entendu, l’aléa politique pourrait être un élément retardateur de la décision d’achat mais éventuellement aussi un accélérateur. Ainsi, l’actualité politique allemande marquée comme la nôtre par des convulsions et des élections législatives anticipées, mais plus habituée au jeu des coalitions, pourrait permettre à la première économie européenne de se libérer d’une entrave ma-
jeure. La remise en cause de la « Schuldenbremse » (littéralement frein à l'endettement) votée en 2009 offrirait ainsi une forme de relance économique qui se diffuserait rapidement à l’Europe entière.
Un cessez-le-feu en Ukraine, favorisé par la nouvelle administration américaine, pourrait également être un élément favorable à l’ensemble des bourses du Vieux-Continent.
Gageons que les marchés auront très probablement l’occasion de revoir leurs copies plusieurs fois cette année et d’y ajouter de la volatilité au gré des déclarations à toute heure du jour et de la nuit en provenance du bureau ovale.
Rédigé le 10 janvier 2025